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Monologues

"La Valise"

Faire le tri dans vie, comme vider sa valise. Pour mieux repartir

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et voilà, je suis là.
Voilà. 
A la rue.
Je suis seule, oui. 
Je suis partie. 
J’ai claqué la valise et je suis partie en laissant tout. 
Tout ce qui comptait.

Ma brosse à dents, je l’ai laissée sur le bord d’un lavabo, crasseux.
Je n’en pouvais plus de cette vieille croûte qui se permettait d’aller récurer la merde des autres, d’aller gratter le petit défaut, le truc pas raccord. 
« Brosse à dents »… s’il savait que je l’appelais comme ça il m’aurait virée depuis bien longtemps. 
Ca n’aurait peut-être pas été plus mal en fait.
J'aurais trouvé autre chose. On fini toujours par se débrouiller, non ? 

Il risque de faire froid cette nuit.

Je n'ai pas pris ma couette. 
Il n'y a pas la place pour une couette dans une valise. 
Surtout une couette comme la mienne. Trop lourde, trop encombrante.

On s'habitue vite à ces trucs là mais en fait ça prend toute la place. 
Je m'en suis rendue compte un peu trop tard.
Il était jaloux, possessif, étouffant.
Un matin je me suis réveillée, je suffoquais. J'avais oublié de vivre.
J'ai claqué la valise sans rien dire à personne. Pour tout dire, je me suis un peu surprise moi-même aussi.
Je ne regrette pas. Non. 
Pas du tout.
Je respire mieux. 

Mais, ce n'est pas facile de réapprendre.

Ce qui va me manquer, me manque déjà, c'est mon miroir.
Mon petit miroir.
De toute façon je ne pouvais plus me regarder en face, ça aurait été con de l'emporter.
Ca aurait surtout été égoïste en fait.
J'ai hésité, longtemps. Mais je crois que c'est mieux pour elle.
J'espère seulement qu'un jour elle comprendra.
Quand elle est née, je voulais que ce soit le reflet parfait.
Moi, mais en mieux.
Tout ce que j'ai raté, pas achevé, je voulais le voir dans le miroir.
J'ai cru que c'était mon double.
Mon petit double.
Je voulais lui offrir le meilleur visage, mais je me suis mentie. 
Elle a sa vie, je lui ai volée. 

Voilà, je n'ai pas de miroir. Je ne sais plus trop bien à quoi je ressemble. Pas à grand-chose sans doute.
Ca viendra ? 

Je suis partie vite, je n'ai pas pris grand-chose du coup.
J'avais le cœur lourd et j'ai fait le ménage.
Une valise vide, c'est plus léger.

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